Dans cette fiche explicative, nous allons apprendre à identifier les conditions pour que deux matrices soient égales.
L’algèbre linéaire étant différente de l’algèbre conventionnelle, il n’est pas surprenant que des concepts fondamentalement différents soient impliqués. Des notions telles que la dimension, le type et la transposition n’apparaissent tout simplement pas dans l’algèbre conventionnelle. Dans l’algèbre conventionnelle, deux quantités sont égales si elles ont la même valeur. Si et , par exemple, alors on peut dire que les deux quantités sont égales et écrire .
Par contre, si et , alors ces quantités ne sont évidemment pas égales et on note . Ces quantités sont cependant liées : on a par exemple ou de manière équivalente, . Ce n’est pas la seule relation entre et dans ce cas, car on pourrait aussi dire que ou de manière plus complexe que . On pourrait inventer une infinité de relations de ce type, à condition que les deux membres de l’équation aient la même valeur.
Pour que l’algèbre linéaire soit bien applicable, nous avons besoin d’une définition de l’égalité, qui nous permettra de décrire les relations entre les matrices. La notion d’égalité dans l’algèbre conventionnelle est celle que nous avons décrite ci-dessus, pour l’algèbre linéaire, nous devons cependant considérer que les matrices ont plusieurs coefficients et notre définition de l’égalité doit donc prendre cela en compte.
Définition : Égalité de deux matrices
Soient deux matrices, de dimension et de dimension , décrites par leurs coefficients comme suit :
Les deux matrices sont alors dites égales, c’est-à-dire , si leurs dimensions sont égales et si leurs coefficients correspondants sont égaux. En d’autres termes, les deux conditions suivantes doivent être vérifiées :
Réciproquement, si ou , ou s’il existe et tels que , alors les deux matrices ne sont pas égales, c’est-à-dire .
Notez que cette définition de l’égalité est beaucoup plus stricte qu’une égalité régulière de la forme , car nous devons vérifier que les dimensions des matrices et que tous les coefficients de chaque matrice sont égaux. En particulier, même si tous les coefficients correspondants possibles sont égaux mais que les dimensions ne sont pas égales, alors les matrices ne peuvent pas être égales. Nous allons montrer cela dans l’exemple suivant.
Exemple 1: Conditions pour l’égalité de matrices
Soient est-il vrai que ?
Réponse
Les matrices et peuvent être notées
On rappelle que pour que deux matrices soient égales, leurs dimensions et leurs coefficients doivent être égaux. Dans ce cas, on remarque que certains coefficients correspondants sont égaux. Par exemple,
Cependant, les dimensions des matrices ne sont pas identiques. La matrice a deux lignes et trois colonnes, donc c’est une matrice , tandis que la matrice a deux lignes et deux colonnes, ce qui en fait une matrice . Cette colonne supplémentaire est entourée ci-dessous :
Comme les dimensions de ces matrices ne sont pas équivalentes, il n’est pas vrai que .
Remarquez que les deux matrices soient de même dimension est une condition nécessaire pour l’égalité, mais cela n’est pas une condition suffisante. Si deux matrices sont de même dimension, cela ne signifie pas automatiquement qu’elles sont égales. Cela est très simple à démontrer avec les deux matrices ci-dessous :
Ces matrices ont toutes les deux 3 lignes et 4 colonnes et sont donc toutes les deux de dimension . Ce sont aussi deux matrices très simples : chaque coefficient est nul à l’exception de , mis en évidence ci-dessus. Comme , ces matrices ne sont pas égales et on écrit donc .
Exemple 2: Identifier l’égalité de matrices
Soient est-il vrai que ?
Réponse
On rappelle que pour vérifier que deux matrices soient égales, nous devons confirmer qu’elles sont de même dimension et que pour tous et .
Ces deux matrices sont toutes les deux de dimension , afin de vérifier leur égalité, nous devons donc comparer chaque coefficient. Dans les matrices ci-dessous, chaque coefficient est mis en évidence avec une couleur différente pour pouvoir les comparer facilement :
En comparant les coefficients en haut à gauche, on constate que et en comparant les coefficients en bas à gauche, on a . En comparant cependant les coefficients en haut à droite, on voit que , tandis que , donc . De même, en bas à droite, on voit que , tandis que , donc . Comme ces matrices ne remplissent pas la condition pour tout couple ( ), elles ne sont pas égales.
Lorsque l’on travaille avec des matrices plus grandes, le même principe s’applique mais avec un plus grand nombre de comparaisons à effectuer. En pratique, plutôt que d’écrire chaque comparaison, on observe les deux matrices pour déterminer s’il existe des différences entre les coefficients correspondants. Considérons par exemple les deux matrices de dimension :
Comme ces matrices sont de même dimension, on cherche des coefficients correspondants non égaux :
On a et , ce qui donne deux raisons pour lesquelles .
Exemple 3: Résoudre des équations en utilisant l’égalité matricielle
Sachant que déterminez les valeurs de et .
Réponse
On rappelle que deux matrices de même dimension sont égales si pour tous et .
Commençons par mettre en évidence tous les coefficients que nous devons comparer :
Deux paires de coefficients sont visiblement égaux dans les deux matrices : et .
Pour assurer l’égalité de ces matrices, on définit , ce qui implique que , donc . On définit maintenant , ce qui donne , et donc . Par conséquent, la matrice finale est et , .
La question ci-dessus montre à quel point la condition d’égalité matricielle est restrictive. Les matrices de la question précédente étaient toutes les deux de dimension et avaient donc 4 coefficients chacune. Nous avons pu immédiatement observer que deux paires de coefficients étaient identiques entre les deux matrices. Même après avoir trouvé deux cas d’égalité, nous avons tout de même dû vérifier les deux paires de coefficients restants. Si seulement deux coefficients correspondants avaient été différents, les matrices n’auraient pas été égales par définition.
Les deux exemples suivants montrent comment l’égalité entre les matrices peut dépendre du calcul de plusieurs variables.
Exemple 4: Résoudre des équations en utilisant l’égalité matricielle
Déterminez les valeurs de et , sachant que :
Réponse
On rappelle tout d’abord que si deux matrices de mêmes dimensions sont égales, alors pour tous et .
On met en évidence les coefficients correspondants ci-dessous :
On a déjà facilement et donc aucune vérification supplémentaire n’est nécessaire pour ces coefficients.
En définissant , on obtient l’équation . En la résolvant pour déterminer , on obtient
En définissant , on a , ce qui implique que . En conclusion, et .
Exemple 5: Résoudre des équations en utilisant l’égalité matricielle
Sachant que déterminez les valeurs de et .
Réponse
On rappelle que deux matrices de même dimension ne sont égales que si tous leurs coefficients correspondants sont égaux. On peut donc comparer tous les coefficients correspondants, ce qui donne le système d’équations linéaires suivant
On remarque que l’on peut additionner les deux premières équations, et , pour éliminer . Cela nous donne
En substituant cette valeur de dans la première équation (bien que la deuxième puisse également être utilisée), on obtient
Maintenant que l’on connaît les valeurs de et , on peut résoudre pour calculer . Cela nous donne
Enfin, on peut calculer avec la dernière équation, :
En conclusion, , , et .
En superficie, vérifier que deux matrices sont égales revient simplement à effectuer plusieurs vérifications de l’égalité entre tous les coefficients de la matrice. Cette tâche monotone est cependant totalement exacte, car la définition de l’égalité des matrices nécessite en effet de comparer tous les coefficients des deux matrices impliquées. Cette tâche est toutefois différente lorsque nous travaillons sur des matrices dont les coefficients sont définis en fonctions de variables et de nombres. Cette flexibilité, lorsqu’elle est combinée avec d’autres opérations de l’algèbre linéaire (telles que le produit, la puissance et l’inversion matriciels), permet de répondre à des problèmes mathématiques plus élaborés, comme nous l’avons vu précédemment. Par exemple, si le produit matriciel est défini, il est possible de définir des systèmes entiers d’équations linéaires en fonction de simples équations matricielles, fournissant un langage puissant et concis pour travailler sur de tels concepts avancés. Bien que la définition de l’égalité matricielle puisse sembler inutile ou triviale, elle est d’une importance cruciale pour comprendre l’algèbre linéaire et les nombreux outils mathématiques indispensables que ce domaine a fournis.
Points clés
- Soient deux matrices, de dimension et de dimension , décrites par leurs coefficients comme suit : Alors si, et seulement si,
- L’égalité matricielle est une condition stricte. S’il existe et tels que , alors .
- De plus, si et sont de dimensions différentes, alors .
- On peut trouver des valeurs inconnues qui rendent deux matrices égales en formant et en résolvant des équations.